Apprivoiser son cheval

 

 

Pour apprivoiser son cheval et créer une relation complice avec lui, un merveilleux moyen s'ouvre à nous, quelle que soit la discipline que l'on pratique : l'équitation éthologique

L'équitation éthologique renoue avec l'histoire

L'équitation éthologique, dans la grande tradition classique, consiste d'une part à éduquer et à utiliser le cheval dans le respect de sa nature, d'autre part à s'éduquer soi-même pour être à la hauteur de cette tâche. Pour La Guérinière, considéré comme le père de l'équitation classique française, l'éducation du cheval faisait partie de l'instruction du cavalier. L'une ne pouvait aller sans l'autre. C'était logique : pour réaliser un reculer par exemple, il faut que le cavalier sache quelles aides il doit employer mais aussi comment enseigner ce mouvement à son cheval. Faute de cet enseignement, le cheval ne comprend pas, se bloque et la relation dégénère en conflit. Au fil du temps et pour des raisons diverses ces deux activités se sont séparées. L’Equitation classique qui englobait instruction et dressage s’est peu à peu réduite à l’art de monter à cheval, c’est-à-dire à l’éducation du cavalier, seul aspect qui a été pris en compte par l’équitation officielle.

En conséquence de nos jours, si vous poussez la porte d'un centre équestre pour apprendre à monter à cheval et que vous suivez l'enseignement officiel des Galops, vous pourrez passer votre brevet de cavalier et plus si affinité, mais vous n'apprendrez jamais à éduquer un cheval. Quant à votre monture, elle sera ce qu'elle sera : en général du tout venant plus ou moins fonctionnel, pliée aux habitudes du centre équestre dans lequel elle opère, à la suite d'un débourrage souvent expédié et d'un dressage généralement sommaire, vu que vos enseignants ont suivi le même parcours que vous et ont dû se débrouiller comme ils ont pu devant ce problème qu'on ne leur a pas appris à résoudre. Un simple exemple, quels sont les chevaux de club capables d'évoluer en flexion de nuque, base de l'équilibre rassemblé, lui-même pilier de l'équitation classique ? et quels sont les cavaliers en mesure de la demander ? Il suffit pourtant de dix minutes pour l'enseigner à son cheval et… d'un peu plus longtemps pour que le cavalier la demande convenablement.

A quoi sert notre science de cavalier si elle fait de nous de simples exécutants, incapables d’éduquer ce cheval qui refuse d’obéir ?

L'équitation éthologique comble cette lacune. Elle réunifie les deux activités, comme à l’époque classique mais avec des bases révisées. C’est à nouveau en éduquant notre cheval que nous allons éprouver la nécessité de nous instruire. C’est parce que nous voulons enseigner à notre monture à s’incurver que nous allons apprendre les aides d’incurvation. C’est parce que nous voulons l’inviter à bouger la tête, les hanches ou les épaules que nous allons nous intéresser aux effets de rênes et de jambes. L’équitation n’est plus une fin en soi, mais un moyen pour développer toujours plus notre complicité avec lui. L’objectif est de faire de l’homme et de l’animal des partenaires, notion qui suggère l'alliance, l'échange, l'égalité des rapports, la compréhension. Comment ? En refusant le conflit. On ne se bagarre pas avec un partenaire, on recherche son adhésion - jusqu'alors apanage de la haute école - on obtient alors sa complicité et cette qualité devenue rare : la légèreté.

Pour atteindre ses objectifs, cette équitation va demander aux scientifiques et aux hommes d’expérience de l’éclairer. Qui est en définitive ce cheval dont nous voulons faire notre partenaire ? Les éthologues, certains chuchoteurs et bien entendu les auteurs classiques nous répondent. Nous, les enseignants de France, pourrons alors mettre en place des méthodes qui renoueront avec nos traditions, réactualisées à la lumière de ces nouveaux apports. Nous pourrons guider nos élèves pour créer une relation nouvelle, plus profonde car beaucoup plus intime, plus exigeante aussi, car elle nous met en face de nos défauts et de notre inexpérience. Ce retour sur soi et cette connaissance de l’animal vont entraîner de grandes transformations. Ce ne sera plus le moniteur qui nous reprendra avec tous les effets négatifs de cette pédagogie de l’échec, mais notre propre cheval qui mettra en évidence nos points faibles et nous insufflera le désir de nous perfectionner. L’enseignant abandonnera son rôle de maître au cheval pour celui de guide, de conseiller qui ne réprimande plus, mais aide à progresser et à se dépasser. Cette approche nouvelle contient les germes d’une fascinante alchimie.